Pierre Dulude

Pierre Dulude

Un temps pour...!

 

 

Un temps pour …

 

Ce matin, au lever du soleil qui joue du coude avec la couche de nuage  l’obstruant, il règne  un climat incertain d’humidité  annonçant de la pluie. La boule de feu ne se rend pas ; elle grimpe tout en douceur dans le ciel arrosé de ses coloris pastel. Un vol immense d’outardes  a pris l’axe du sud. L’automne  s’installe peu à peu. Le V des oiseaux d’une perfection virtuose se laisse guider par une outarde d’expérience. Leur  glapissement glisse sur leurs ailes encore enduite de rosées matinales. Départ précoce –me dis-je – tout en admirant leur ballet aéronautique.

 

Je retourne voir où en est le soleil avec son combat contre la masse nuageuse. Il se faufile tout en transperçant les  strates de coton ouatées .Des rayons fusent de toutes parts  comme de grands jets de lumière accompagnés de feux d’artifice. Les reflets dans la rivière donnent une impression de profondeur à la scène. Le dédoublement est invraisemblable tellement  tout concorde. Le cercle  jaune paraît enfin et vient s’éclater à la surface de l’eau  en son jumeau. Des canards badinent à la surface  ce qui vient rajouter une touche de finition. Je suis bouche bée  face à cette beauté et ce spectacle incommensurable .Je remercie le Créateur de me faire voir ces moments délicats de sensibilité. Je me sens vivre et  heureux. Pas de question, d’interrogation. Seulement apprécier l’exquis de la nature.

 

Je me déplace de quelques pas à ma droite et un détail vient me sauter aux yeux, détails qui m’amèneront beaucoup de réflexions. Je remarque l’immense toile d’araignée, qui était là hier en axe est-ouest, flotte maintenant dans un axe sud-nord. Cette immense construction – les plus longs fils doivent avoir au moins un mètre à un mètre et demi du bas vers le haut autant de la gauche vers la droite; tout un chef-d’œuvre digne d’une ingénieure des  câbles de suspension. Je me demande :

 

-Pourquoi la toile fait face au sud ce  matin tandis qu’hier elle faisait face à l’ouest ?

 

J’examine de plus proche son occupante, un beau spécimen arachnide des bords de l’eau. .Comme  un détective je scrute les environs et vois que ses fils principaux sont encrés à des bornes des plus solides que ses dernières positions de la veille. Elle a donc réévalué ses plans et a probablement travaillé toute la nuit ; belle petite bête intelligente.

Le soleil vient montrer les infinis détails de l’architecture de la construction. Je me dis :

 

-Un si petit animal qui érige des choses semblables ; quelle merveille.

 

L’araignée ne semble pas préoccupée du tout par ma curiosité. Elle monte ses longs câbles pour solidifier encore plus son œuvre. Les tâches vertes sur son abdomen brillent à l’astre du jour .Les fils tendus à l’extrême exhibe les cercles en concentriques  au centre. Un goéland, un peu nasillard, vient fureter tout près. Il ne semble pas de bon poil ce matin. D’autres de ses frères sont venus empiéter sur son territoire .Il se gonfle le plumage pour les impressionner et leur lance des cris rauques pour les avertir de ne pas trop outrepasser les limites.

Une pensée me vient à l’esprit :

 

-Vanités des vanités; tout est vanité.

 

Ne sommes nous pas un peu comme mon ami cet oiseau murmurateur . Ne voulons nous pas projeter une image qui, bien souvent, ne nous ressemble pas .Ne lançons nous pas à nos semblables des avertissements par nos agissements qui nous éloignent d’eux ? En faisant de la sorte nous nous rejetons nous-mêmes des liens de solidarité qui nous unissent à notre espèce ?

 

Le goéland se pavane de long en large tout en faisant semblant de s’offusquer des avancés des autres goélands. Ces derniers font fi des cris plus ou moins éraillés de leur congénère et continuent de se nourrir d’insectes. Je reviens vers mon ingénieure qui finit de fignoler le bas de sa toile .Elle semble tester l’élasticité des câbles de soutènement. Au sol, dans la rosée, le soleil se mire dans les minuscules gouttes  qui ont envahie, aussi les rangs serrés de la toile de l’arachnide. Une exposition de rangs de perles rend la toile féérique. Je me redéploye vers le décor  champêtre du cercle de feu d’un jaune foudroyant, Une autre envolée d’outardes passe  laissant  sur sa trace des glapissements d’euphorie.

 

-Quand il faut partir ; il faut partir – me dis-je.

 

Revenant, par un autre angle, à la construction de l’heure je distingue clairement tous les fils de la toile qui soutiennent l’œuvre, Il y en a  sept. Quatre vont vers les points cardinaux et les  trois autres sont intermédiaires Quel  génie. Je remarque aussi un très long fils qui sillonne la toile et qui va se nicher tout en haut dans l’arbre le plus proche. J’avais déjà lu dans une encyclopédie que ce fil était celui de la retraite en cas de danger  de prédateurs. Pas une grosse créature ; mais douée d’intelligence.

 

Nous aussi nous avons nos qualités, nos défauts, nos forces et nos faiblesses. C’est que nous avons l’intelligence, mais savons nous bien nous en servir ?  Me dis-je.


Avons-nous, nous  aussi, un fil de retraite pour le ‘’ au cas où?’’ Lorsque nous construisons ; construisons nous sur du solide et parachevons-nous de façon sécuritaire et durable ? Mon alliée l’araignée m’a amené très loin ce matin.

 

 

Le soleil bien campé dans le zénith se rit bien, maintenant du petit amas de nuages qui fond à vue d’œil. Une vingtaine d’outardes amerrissent en face de moi. Elles percent la surface miroir de la rivière et semblent s’en amuser. Leur concert égaye l’atmosphère. On se sent indiscret en s’immisçant dans leur délibération. Il semble qu’il y ait eu un imbroglio dans le V en vol. Le chef de file caquasse comme pour donner des instructions. Le calme s’établit et tout comme elles sont arrivées elles repartent tout de go.

Quels magnifiques oiseaux. Mon goéland, dominant, s’est calmé quelque peu. Il surveille les environs  pour en chasser les intrus. L’araignée s’est maintenant installée  au centre de sa toile et semble prendre un repos bien mérité jusqu’à la prochaine grosse pluie qui saccagera  sa maison, et comme un infatigable travailleur, si cela arrive, elle recommencera du début à la fin. Tout comme la nature se régénère elle suit le courant.

 

Tout comme nous, lors des problèmes, des conflits et des difficultés, nous recommençons et avançons. Lorsque nous subissons des pertes et affrontons les affres de la vie nous nous retroussons les manches et nous nous remettons à la tâche .Nous reconstruisons, nous reformons et nous agissons .Mon amie à huit pattes en sais quelque chose. Si elle ne le fait pas elle met en jeu sa survie car sa toile est aussi son instrument de travail pour sa nourriture et le gîte pour sa future descendance. Toujours avec son lien de sécurité.

 

L’astre, maître du jour et de la lumière,  brille de tous ses rayons. Les feuilles des arbres commencent à prendre une couleur d’automne. Les gens se sentent tristes en ce temps de saison; pas moi ! Car l’automne annonce, pour plus tard,  un regain de vie, de renouveau qui sera, après l’hiver, le printemps ou tout redeviendra encore plus vivant qu’avant. Les teintes sont magnifiques. Les coloris explosent tout en chaleur. Les oiseaux migrateurs occupent le ciel à pleine volées. Ils rajoutent au spectacle terrestre le petit plus pour faire de ces journée des jours de joies et de plénitude. Dieu que je suis content d’être envie et de pouvoir sentir ces flux de bonheur en moi. Pour tous ceux et celles qui se sentent déprimés et un tantinet triste  je vous envoie des ondes lumineuses d’énergie venant directe de l’univers.

 

Je regarde une dernière fois l’araignée se chauffant au soleil tout en attendant  son prochain repas qui se fait plus rare en ce temps de saison. Sa patience sera récompensée.
Je décide de garder  silence pour une vingtaine de minutes ;le temps de laisser l’influence de l’Esprit me donner la force de remercier mon Créateur pour de si merveilleux moments.

 

‘’Il y a un moment pour tout, et un temps pour chaque chose sous le ciel :
un temps pour engendrer, et un temps pour mourir ; un temps pour planter, et un temps pour arracher…………….

 

Livre de l'Ecclésiaste 3,1-11.

 

Pierre D.

Les Ailes du Temps

Laval, 24 septembre 2010

 

 

 



05/10/2010
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